Quel est le point commun entre le football et le jazz ? Saxophoniste de jazz réputé dans le monde entier et passionné de football, Igor Butman est bien placé pour répondre à cette question, lui qui a récemment été nommé nouvel ambassadeur de la ville hôte de Saransk pour la Coupe du Monde de la FIFA, Russie 2018™.
"Que ce soit dans le football ou dans le jazz, il faut travailler dur", affirme le musicien de 54 ans au micro de FIFA.com. "Il faut consentir beaucoup d’efforts pour devenir un virtuose ou pour faire partie des meilleurs joueurs retenus pour représenter un pays. La musique et le football exigent un investissement et un engagement personnels de tous les instants chez celui qui pratique ces arts afin d'atteindre un haut niveau. Les équipes de football, les orchestres philharmoniques et les groupes de rock sont capables d’attirer 30 000-40 000 personnes dans un stade, mais ils doivent être à leur tout meilleur niveau pour pouvoir procurer du plaisir au public. Il faut donc du génie et un investissement total."
Talentueux chef d’orchestre d’un jazz band, Butman établit un parallèle entre sa profession et celle d’entraîneur de football. "J’ai seize musiciens dans mon orchestre. Comme les footballeurs, leur humeur peut varier", ajoute-t-il. "Certains peuvent avoir passé une très bonne journée alors que d’autres non. En tant que chef, je dois les mettre dans la bonne dynamique, que ce soit en les inspirant, en leur passant le bras autour de l’épaule ou en les stimulant. Il est possible de procéder à des remplacements en cours de concert. Il y a aussi une dimension tactique et stratégique. Toutefois, l’ingrédient le plus important est le talent car que ce soit en football ou en musique, on ne va nulle part sans lui."
Saransk, qui est la plus petite ville hôte de Russie 2018, organise chaque automne un festival international dont Butman est le directeur artistique. Toutefois, c'est un événement d'une toute autre ampleur que la capitale de la République de Mordovie, qui compte une population de 300 000 habitants, va accueillir en 2018. "J’ai entendu beaucoup d’opinions divergentes sur le choix de Saransk pour accueillir des matches de Russie 2018", poursuit le saxophoniste."Selon moi dont la relation avec la ville remonte à de nombreuses années, Saransk est un endroit magnifique avec une architecture unique et une riche culture. Ses habitants ont toujours eu avec un grand sens de l’hospitalité. Les musiciens adorent venir ici et je n’y réfléchis jamais à deux fois avant d’inviter des gens."
"La ville se sera encore plus métamorphosée d’ici à 2018, avec la création de nouvelles routes, de nouveaux hôtels et d’un stade" ajoute-il. "Les habitants locaux vont se mettre à l’ouvrage et seront vraiment libérés. Ils seront fiers que la Coupe du Monde se dispute dans leur ville car Saransk deviendra célèbre non seulement en Russie mais aussi dans le monde entier. Saransk sera sur toutes les lèvres, prononcé avec tout un tas d’accents. Les gens demanderont : "D’où êtes-vous ?". Et les gens d’ici répondront avec fierté : 'Je suis de Saransk !'."
Accueillir une Coupe du Monde de la FIFA est une mission de grande envergure pour une ville car elle doit réfléchir à ce qu’elle peut offrir aux visiteurs en marge des matches de football. "Pour les villes russes, c’est un gros challenge", explique Butman. "Elles doivent tout organiser et veiller à ce que les visiteurs puissent non seulement assister à des matches de qualité mais aussi apprécier notre hospitalité à sa juste valeur. Chaque endroit à sa propre saveur. Je pense que les visiteurs qui afflueront à Saransk auront droit à un riche programme culturel. Les expositions d’art national et d’art moderne sont très fréquentes ici."
Rêves et projets Butman sera particulièrement heureux si son équipe préférée, l’Italie, est amenée à jouer à Saransk au cours de la compétition. "En 1982, j’ai gagné une bouteille de champagne après avoir parié avec mon premier directeur artistique que l’Italie gagnerait la Coupe du Monde", révèle le jazzman. "Les premiers matches des Italiens avaient soulevé beaucoup d’interrogations mais après leurs victoires face à l’Argentine puis au Brésil, plus personne ne doutait d’eux. J’ai été inspiré par les prestations extraordinaires des Italiens, notamment du légendaire Paolo Rossi."
Aujourd’hui, Igor admire d’autres héros du ballon rond. "Je prends plaisir lorsque Messi, Ronaldo, Kokorin, Dzyuba ou Dzagoev marquent un beau but. J’ai récemment fait la connaissance du défenseur Sergei Ignashevich. C’est un mec extraordinaire et nos familles sont devenues amies. Mon fils supporte le CSKA Moscou et Sergei lui a offert un maillot, qu’il adore."
Cela fait longtemps que la Russie n’a pas passé la phase de groupes d’une Coupe du Monde. Pourtant, Butman estime que son pays doit positiver. "Rien n’est impossible", estime-t-il. "Notre équipe a l’occasion de réaliser une bonne performance, il faut juste que les joueurs croient en eux et évoluent à leur tout meilleur niveau. L’autre jour, j’étais dans le train pour Saransk et j’y ai regardé un film sur l’équipe des États-Unis à Brésil 1950, qui était composée de joueurs amateurs. Les Américains n’avaient gagné qu’un seul match, mais contre la grande équipe d’Angleterre, 1:0. J’espère que nos joueurs seront en forme et qu’ils nous feront plaisir avec leurs performances."
Comme tous les passionnés de football, Butman a hâte d’être à la Coupe du Monde 2018, dont il estime qu’elle va être très bénéfique à la Russie en tant que pays. "Bien entendu, il y aura toujours des gens qui demandent pourquoi nous avons besoin d’accueillir la Coupe du Monde et les Jeux Olympiques. Autant renoncer à vivre : ne rien faire, ne pas avoir de rêves, n’avoir aucun grand projet. Je ne crois pas que cela nous corresponde ! Nous allons travailler encore plus dur et nous tourner vers de nouvelles réalisations. Car si la Coupe du Monde ne sera que de passage, les infrastructures, elles, resteront. Et il faudra utiliser ces mêmes infrastructures pour des célébrations, des festivals et des événements sportifs. Nous devons organiser davantage d’événements pour les jeunes, et rechercher de nouveaux talents dans le football, le hockey sur glace et la musique. Nous devons créer les conditions pour que les ingénieurs et les scientifiques puissent travailler ici.
Et de conclure : "La Russie doit occuper la place qu’elle mérite et cela nécessitera beaucoup de travail. Nous devons veiller à ce que cette célébration reste longtemps dans les mémoires. Unissons nos forces pour être des hôtes formidables."