vendredi 30 mars 2018, 16:12

Thiago Alcántara : "L'Espagne peut rêver en grand"

  • Thiago Alcantara disputera en Russie sa première Coupe du Monde

  • Le milieu de terrain du Bayern analyse la forme actuelle de la Roja

  • "Lopetegui a évolué comme entraîneur", estime-t-il

Thiago Alcantara a grandi balle au pied. Son père, Mazinho, a été champion du monde avec le Brésil en 1994. Son petit frère, Rafinha, joue avec la Seleçao, et lui avec l'Espagne. "Avoir un père champion du monde, ce n'est pas mal, hein ?", fait-il remarquer avec un grand sourire.

Cela explique peut-être sa volonté de toujours de devenir footballeur. Quand il était petit, il lui arrivait souvent d'aller voir jouer Mazinho et ses coéquipiers. "Par exemple, quand Pedja Mijatovic jouait à Valence avec un chewing-gum dans la bouche, je faisais la même chose en regardant les matches et en jouant. Mijatovic, le Russe Alexander Mostovoi… J'avais pas mal de modèles, mais ma principale référence a toujours été mon père", assure-t-il.

Après avoir manqué la Coupe du Monde de la FIFA™ au Brésil en raison d'une grave blessure au genou, Thiago a désormais l'occasion de marcher dans les pas de Mazinho, en Russie cette fois. Et il le fera comme pierre angulaire de l'entrejeu espagnol.

À moins de trois mois des débuts de la Roja dans la compétition, face au Portugal, le joueur du Bayern Munich répond à FIFA.com. Il analyse entre autres la bonne forme actuelle de l'Espagne, livre ses pronostics pour Russie 2018 et évoque ses souvenirs mondialistes.

Thiago, la Coupe du Monde arrive-t-elle alors que vivez votre meilleure période sous le maillot de l'Espagne ? C'est une Coupe du Monde. Pour n'importe quel footballeur, jouer cette compétition est un rêve à réaliser. Et au vu du jeu que nous produisons et de notre série de victoires en cours, nous avons le droit de laisser libre cours à notre imagination et de rêver en grand. Nous rêvons d'aller le plus loin possible, d'évoluer au plus haut niveau et de démontrer que le football que nous produisons peut nous mener loin. Nous savons ce que nous valons. Nous avons terminé premiers de notre groupe devant l'Italie, qui ne sera pas en Russie, et nous avons livré d'excellentes prestations en amical contre de grandes équipes… Les résultats seront au rendez-vous. Cela dit, je n'aime pas non plus annoncer les choses avant qu'elles ne se produisent.

En 2013, vous avez gagné l'UEFA EURO U-21 avec Julen Lopetegui comme entraîneur, et des coéquipiers comme De Gea, Isco, Koke, Morata… Le moment de franchir la dernière marche est-il venu pour cette génération ? Nous sommes très compétitifs et c'est d'ailleurs ce qui nous a permis d'en arriver là. Mais plutôt que de parler entre nous de franchir cette dernière marche, nous faisons ce qu'il faut pour y arriver. Sur le terrain, nous avons confiance les uns dans les autres. Cela fait pas mal d'années que nous évoluons ensemble au plus haut niveau, et nous visons les objectifs les plus élevés.

Le saviez-vous ?

  • Thiago a remporté l'UEFA EURO U-19 en 2009 et l'UEFA EURO U-21 en 2011 et 2013. Dans cette dernière édition, il avait été élu meilleur joueur et avait inscrit un triplé en finale contre l'Italie (4:2).

  • Sur les 18 matches de l'ère Lopetegui, il en a disputé 15, dont 13 comme titulaire, et a marqué 1 but.

Cela fait pas mal d'années que vous êtes sous les ordres de Lopetegui en sélection. Quelle évolution avez-vous observé chez lui en tant qu'entraîneur ? Nous avons tous évolué car nous avons soif d'apprendre, d'être meilleurs, et c'est la même chose pour Julen. Il y est parvenu comme entraîneur. Il a lui-même progressé dans tous les domaines. Je me souviens des causeries d'avant-match. Avant, il préparait ça bien, mais il s'est encore amélioré. Il explique très bien les choses. C'est quelqu'un qui s'exprime bien, et il le fait désormais de façon plus directe. Il sait comment s'adresser à nous, comment nous motiver.

Avez-vous également remarqué des changements dans sa façon de traiter les joueurs ? Les joueurs ont un gros ego et il faut savoir leur parler (rires). Heureusement, il a deux qualités : d'abord celle d'avoir été joueur, donc il est passé par là et sait comment nous aborder ; ensuite, il a ce don qu'ont certaines personnes de savoir transmettre ce qu'il désire vraiment. Grâce à cette combinaison, il réussit à faire en sorte que tout soit parfaitement clair pour nous.

Si l'on tient compte de ce qui est arrivé en 2014, comment combinez-vous la volonté de vous donner au maximum et la peur de la blessure qui pourrait vous faire manquer le tournoi ? Je n'ai pas cette peur, car jouer au ballon est quelque chose de naturel. Nous le faisons tous les jours. Il y a certaines choses un peu téméraires que l'on ne va peut-être pas tenter, mais je crois qu'on ne les tenterait pas non plus en temps normal. Mais nous sommes au plus haut niveau. Au final, un pompier qui est sur le point de prendre sa retraite ne va peut-être pas entrer dans une maison en flammes pour son dernier jour de travail. Nous avons parfaitement assimilé qu'après la saison avec nos clubs respectifs, il y aura le Mondial. Si vous terminez la saison à un niveau élevé, vous commencerez la Coupe du Monde au même niveau.

Thiago félicite son père sur Instagram avec une photo de lui et de son frère, à côté de Mazinho, lorsque ce dernier jouait à Valence

À Brésil 2014, la mode était à la défense à cinq. À quoi vous attendez-vous en Russie ? C'est de bonne guerre pour les équipes réputées plus faibles contre les plus fortes. Cela dit, même l'Allemagne joue parfois avec une défense à cinq. Dans le football allemand, c'est le système le plus utilisé. Ils aiment dire que c'est une défense à trois, mais dans la réalité il y a cinq défenseurs. C'est ce que faisait Pep Guardiola au Bayern, ou ce que pratique actuellement Gérone en Espagne, avec deux latéraux très offensifs.

Précisément, Lopetegui s'est renseigné auprès de l'entraîneur de Gérone, Pablo Machin, au sujet de son système de jeu. Vous pose-t-il des questions à vous aussi en raison de votre expérience en Bundesliga ? Pour parler de football, je suis toujours disponible ! Il est plus compliqué de jouer devant une défense à cinq qu'à quatre. Quand vous avez des latéraux offensifs, il faut faire attention, car à un moment donné ils étirent le jeu et vous devez avoir beaucoup de milieux offensifs pour pouvoir rompre la ligne de la défense et permettre à vos attaquants de fixer les centraux. On peut encore parler des aspects tactiques pendant une demi-heure (rires).

Quel est votre premier souvenir lié à la Coupe du Monde ? Mon premier souvenir est la Coupe du Monde 1994, que mon père a gagnée. J'avais seulement trois ans, donc je ne me souviens pas des matches, mais je me rappelle de son retour à la maison, de la fête avec la famille… Je m'en souviens parfaitement bien. Et puis, environ deux ans plus tard, j'ai regardé les vidéos des buts.

Et quel match pourriez-vous regarder encore et encore ? La finale entre l'Espagne et la Hollande, évidemment. Le but d'Andrés Iniesta. C'est le moment le plus important de l'histoire du football espagnol. Pour cette finale, nous étions en stage avec la sélection U-19. Il y avait Koke, Rodrigo, Bartra, Canales… Quand Andrés a marqué, tout a volé : les extincteurs, l'huile, les couteaux, la télé est tombée par terre… On n'a pas vu la fin du match (rires).

Résumé de la finale d'Afrique du Sud 2010, qui s'est décidée sur un but d'Iniesta, en prolongation, à la 116ème minute

Votre frère Rafinha a manqué la dernière sortie du Brésil en raison d'une blessure. A-t-il encore une chance d'aller en Russie ? Des chances, il y en a toujours, même si de façon réaliste, elles sont toutes petites pour lui.

Peut-on imaginer un Brésil-Espagne avec vous deux sur le terrain ? Je ne sais pas si mon père le supporterait (rires). Mais évidemment c'est ce que nous voulons tous les deux. On peut même imaginer que cela se passe en finale !

SES PRONOSTICS POUR LA RUSSIE

Les favoris Certaines équipes sont clairement favorites, mais le hasard a aussi un grand rôle à jouer. Dans une Coupe du Monde, les choses se décident souvent sur des détails. Il y a des années, la Turquie avait atteint les demi-finales, la Corée du Sud aussi... Quant aux favoris, je dirais l'Allemagne, car elle est championne du monde en titre, mais aussi le Brésil, l'Argentine, la France, et bien sûr l'Espagne.

La révélation du tournoi La Belgique me surprend, non seulement par les joueurs qu'elle possède, mais aussi par sa manière de jouer. C'est une équipe qui pratique un très bon football. On peut même la mettre parmi les favoris. La Colombie peut aussi réussir quelque chose de bien, car elle a elle aussi de grands joueurs.

Les équipes que vous êtes impatient de voir jouer La Suède m'intéresse, car il y a peu de temps elle a été championne d'Europe U-21. Le Mexique aussi, qui a pas mal de joueurs de qualité. Il y a aussi un certain nombre d'équipes dont il est difficile de prévoir le parcours, mais qui vont nous apprendre des choses.