samedi 13 avril 2019, 09:38

Mballe, réfugié et intégré balle au pied

  • Gérald Mballe a fui la guerre au Cameroun dans une embarcation de fortune

  • Le football a joué un rôle capital dans son intégration dans la société italienne

  • Il a participé aux Jeux Olympiques spéciaux sous les yeux de Didier Drogba

Après des journées traumatisantes passées dans un bateau bondé, les autorités italiennes offraient enfin leur aide à des réfugiés africains lancés à la traversée de la Méditerranée depuis la Libye jusqu’en Sicile. Parmi eux, Gérald Mballe a quitté le Cameroun, son pays natal, après que les conflits armés entre les milices séparatistes et les forces gouvernementales ont rayé de la carte son village. Il a donc entamé une longue marche à travers le Niger, l’Algérie et la Libye avant de monter dans une embarcation de fortune. Toutefois, les sirènes des garde-côtes italiens n’ont pas sonné la fin de son combat.

"Rien n’a été facile en arrivant en Italie", explique le joueur de 20 ans à FIFA.com. "Tout était tellement nouveau. Déjà, je ne parlais pas la langue. Et puis il y avait une discrimination. Je me sentais différent. Je voyais des barrières partout. Le football a joué un rôle clé dans mon intégration. C’est une langue universelle. Il n’est pas nécessaire de parler la même langue pour jouer ensemble. J’allais jouer dans les parcs et, un jour, Luigi Petrillo, mon mentor, m’a proposé de l’aider à entraîner une équipe composée de joueurs en situation de handicap mental."

Simple et pur

"Ces personnes m’ont accueilli avec beaucoup de chaleur humaine. Ils m’ont accepté d’emblée, sans se poser de questions sur ma couleur de peau ou mes yeux. C’était tellement simple, tellement pur", se souvient celui qui a ainsi retrouvé confiance et enfin eu la sensation de faire partie d’un groupe. "Je sentais que les gens écoutaient ce que j’avais à dire. Comme je n’ai pas de formation d’entraîneur, j’ai essayé de m’appuyer sur mes compétences pour les aider J’ai aussi essayé de les responsabiliser et de les encourager en leur disant ‘Vous pouvez y arriver’. Je leur disais que si on arrivait à se passer la balle, on deviendrait une équipe, et que quand on est une équipe, on peut tout réussir".

C’est grâce à son action auprès de cette équipe que Gerald a été choisi parmi les 7500 sportifs originaires de 200 pays pour disputer un match à l’occasion de la dernière édition des Jeux Olympiques spéciaux. Mais comment est-ce qu’une personne polyglotte et saine d’esprit peut prendre part à une compétition sportive pour personnes en situation de handicap mental ? L’une des épreuves auxquelles l’Italie s’est qualifiée à l’occasion d’Abou Dabi 2019 est un tournoi de football à sept destiné à des équipes mixtes réunissant des personnes en situation de handicap mental et des personnes qui "encouragent l’inclusion, l’amitié et l’unité".

Émotion et détermination

Gerald nous explique : "Quand j’ai compris que j’allais aux Jeux Olympiques spéciaux, j’étais ravi. Auparavant, je devais participer à une compétition aux États-Unis, mais on m’avait refusé le visa parce que j’étais réfugié", révèle-t-il. "Je suis très reconnaissant aux organisateurs des Jeux Olympiques spéciaux parce qu’ils rendu possible l’impossible. Ils luttent pour l’inclusion et pour l’intégration. Ils ont dit ‘Si quelqu’un veut s’insérer dans la société, il n’y a pas de raison que ce soit si compliqué de lui faire un visa’. Grâce à eux, tout est devenu possible."

"C’était une expérience merveilleuse, un moment plein d’émotion dans un environnement placé sous le signe de la détermination. Quand on voit autant de personnes aborder les choses de façon positive, sans jamais penser à la couleur de peau, focalisées sur le jeu et sur la victoire, on se dit que le football a vraiment quelque chose de particulier. C’est une langue universelle qui permet de rassembler les âmes."

Tous ensemble pour gagner

"Pour les personnes en situation de handicap mental, c’est vraiment très important. Dans mon pays, on les cache encore dans les maisons. Et en Italie, ils font encore l’objet de discriminations", assure encore Mballe. "Le football leur offre une responsabilité, une valeur. Ils acquièrent des compétences, apprennent le travail collectif, la détermination. Et puis le fait de jouer dans des équipes mixtes prouve qu’on est tous égaux, qu’il ne faut discriminer personne. On joue tous ensemble pour gagner, pour s’entraider et pour s’encourager."

"Disputer les Jeux Olympiques spéciaux leur donne l’impression d’être Andrea Pirlo et Alessandro Del Piero à la Coupe du Monde. C’est bon pour leur amour propre. C’était génial de les voir à l’aéroport et à Abou Dabi, parce qu’ils étaient tout le temps de bonne humeur. Et on a eu l’occasion de rencontrer Didier Drogba et Cafu !"

Le capitaine sacré à la Coupe du Monde de la FIFA, Corée / Japon 2002™ et l’emblématique attaquant ivoirien, aux côtés de Julen Lopetegui, ancien sélectionneur de l’Espagne et entraîneur du Real Madrid, et des superstars Luis Fonsi et Avril Lavigne, étaient les ambassadeurs d’Abou Dabi 2019, dont le slogan était "Meet The Determined" (Le rendez-vous des sportifs déterminés).

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