jeudi 30 avril 2020, 04:45

Le foot à la fête sur l'Île de Pâques

  • Troisième épisode de notre série "The Global Game"

  • 'FIFA.com s'intéresse au football éloigné de la lumière des projecteurs

  • Direction l'Île de Pâques !

"Sur l’Île de Pâques, on joue au foot pour la gloire." Ces mots sont ceux de Roberto Peña Araki, 41 ans, joueur de Rapa Nui, nom officiel de l'île chilienne située en plein Océan Pacifique, à 3 700 kilomètres du continent.

Peña Araki est né et a grandi sur cette île de 363 km², dont la population de 7 500 habitants est composée de l’ethnie rapanui, mais aussi de Chiliens venus travailler dans le secteur du tourisme, principale source de revenu de l’Île de Pâques, connue dans le monde entier pour ses moaïs, ces monumentales statues sculptées dans du tuf volcanique qui représentent les esprits et conservent l’énergie des défunts.

Deux spécimens veillent sur l’Estadio Municipal de Hanga Roa, théâtre de tous les matches et les grands moments du football rapanui. "En 2009, l’ANFA (la fédération nationale du football amateur) a invité la sélection de Rapa Nui à lancer la Coupe du Chili ici contre Colo Colo", se souvient le milieu de terrain. "On s’est préparés deux mois avec Miguel Ángel Gamboa, qui a joué la Coupe du Monde 1982 en Espagne avec le Chili. On a tenu 30 minutes, mais ils nous ont battus 4-0. La FIFA avait parlé de 'Match du siècle’. C’est exactement comme ça qu’on l’a vécu."

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Après la victoire de la sélection lors de la première édition de la Coupe des Peuples Indigènes en 2012, les autorités locales ont lancé la rénovation du stade. Depuis 2014, celui-ci peut accueillir 3 000 spectateurs. Il est aussi doté d’un éclairage artificiel, d’un gazon synthétique et d’une piste d’athlétisme. "Pelé et Elías Figueroa étaient présents pour l’inauguration. Et moi aussi, j’y étais", se rappelle Peña Araki, qui défend les couleurs du Hanga Roa FC, l’un des grands clubs de l’île, dont le derby face au FC Moeroa peut drainer 400 personnes.

Les possibilités d'une île

Deux championnats sont disputés sur l’Île de Pâques : Le 'Competidores', avec 12 équipes, et le 'Senior', réservé aux plus de 35 ans, avec six équipes. L’un se joue les mardis et vendredis, et l’autre les samedis et dimanches. La couverture médiatique ? Les classements et le calendrier circulent par WhatsApp.

Le champion n’est pas amené à évoluer en dehors de l’île. D’ailleurs, la fédération locale (AFIPA) cherche à intégrer l’ANFA afin de disposer d’un cadre officiel. Malgré tout, il a été question de proposer Rapa Nui comme site de la Coupe du Monde de Beach Soccer de la FIFA 2021. Peña Araki, qui apporte également un soutien financier par le biais de ses activités dans le tourisme, se projette vers l’avenir. "J’adore le football. On verra combien il reste d’équipes après le coronavirus. Je mettrai tout en œuvre pour le faire grandir."

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Les femmes veulent entrer en jeu

Vai Iti Tuki a 39 ans. Elle aussi est née et a grandi sur l’île. Elle a hérité son amour du football de son père. Et comme toutes les filles de son âge, elle a commencé à jouer avec les garçons. "Je m’en fichais, moi je voulais juste taper dans le ballon", raconte à FIFA.com la capitaine de la sélection féminine de l’île, chargée en 2009 de former et de coordonner les ramasseurs de balles pour le Match du Siècle.

Cette sélection, Vai Iti Tuki l’a créée elle-même en 2016. "Je formais toujours des équipes à l’école. Et en revenant sur l’île après avoir passé quelques années à Viña del Mar, j’ai remarqué que plusieurs filles avaient envie de quelque chose de plus cadré." La Corporación de Deportes y Recreación Rapa Nui leur a aménagé un créneau au stade et elles ont pris les choses au sérieux. L’équipe a fait son baptême du feu international en 2017 lors d’un tournoi à quatre avec trois équipes de l’île et un club argentin.

C’est grâce à l’invitation au Festival des îles 2018 organisé à Tahiti que l’aventure a vraiment décollé. "On a participé à la compétition de futsal, mais ça ne s’est pas trop bien passé. En 2019, on est revenues, sous les couleurs du club cette fois. On a participé à la compétition de football à 7 et on a pris la quatrième place. On a toutes fait beaucoup de sacrifices pour s’entraîner. Ça nous a motivées."

Alors qu’elles se préparaient à se mesurer à Colo Colo en novembre, elles ont été coupées en plein élan par les manifestations au Chili. Et alors qu’elles s’entraînaient en perspective de leur retour à Tahiti pour participer à la compétition de football à 11, c’est la COVID-19 qui les a stoppées.

L’isolement est difficile à vivre. "Le terrain, c’est une deuxième maison pour nous toutes. Ça nous manque." Mais rien ne saurait les arrêter dans leur entreprise et elles jouent la carte du social. "On s’est associées à un club pour créer une équipe féminine. Ça va attirer davantage de filles et le football les aidera à trouver leur place ici."

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Cet article s'inscrit dans notre série "The Global Game" qui met en lumière le football qui se joue habituellement loin des feu des projecteurs. La semaine prochaine, nous irons en Mongolie.