jeudi 18 mars 2021, 08:02

18 mars 1993 : Les Princes du Parc terrassent les rois d’Europe

Le 18 mars 1993, le PSG remportait un match de légende face au grand Real Madrid, avec un final haletant, un suspense insoutenable et un but d'anthologie. FIFA.com vous rafraîchit la mémoire...

C’est une règle connue de tous les amateurs de football : ne jamais quitter le stade avant le coup de sifflet final. Les spectateurs du Parc des Princes qui y ont dérogé le 18 mars 1993 doivent encore s’en mordre les doigts.

Nous sommes dans les toutes dernières minutes du quart de finale retour de la Coupe UEFA et, en l’espace de quelques secondes, le Paris Saint-Germain et son adversaire du jour, le Real Madrid, passent chacun de l’extase au désarroi - et vice-versa -, en même temps que les sauveurs se transforment en héros maudits.

Au match aller déjà, les derniers instants avaient été décisifs. Un Paris courageux est mené 2-1, mais Alain Roche repousse un ballon de la main dans la surface. Carton rouge, penalty transformé, et les hommes de Benito Floro sont tranquilles avant le match retour. Avec deux buts à marquer, Artur Jorge, l’entraîneur portugais du PSG, y va donc à l’audace : les attaquants David Ginola, George Weah et Amara Simba sont alignés d’entrée, avec le Brésilien Valdo à la baguette. En défense, Antoine Kombouaré, qui a perdu sa place de titulaire à l’arrivée de Roche en début de saison, supplée le défenseur français suspendu aux côtés de Ricardo.

Il ne le sait pas encore, mais le Néo-Calédonien va connaître son heure de gloire, lui qui avait déjà qualifié le PSG au tour précédent en marquant le but de l’égalisation en fin de match à Anderlecht (0-0, 1-1). "On avait tous la bave aux lèvres, on se disait ‘on va les manger’, on va tout faire pour passer", se rappelle le sauveur du Parc Astrid.

Chef d'œuvre collectif

Car les Parisiens ont le sentiment d’avoir mérité mieux à l’aller alors qu’ils ont longtemps fait jeu égal avec les Emilio Butragueño, Robert Prosinecki, Fernando Hierro, Michel et autres Ivan Zamorano. "Il y avait quelque chose de palpable", croit se souvenir Ginola à l’évocation de l’avant-match. "Une envie de dire ‘au match aller, ça n’allait pas, il faut qu’on remette les pendules à l’heure, qu’on change tout ça’. Mais pour ça, il fallait qu’on soit tous ensemble, de la première à la dernière minute."

Message reçu. En début de match, une tête de Valdo passe au-dessus, une autre de Ricardo trouve la transversale. Entre talent défensif et réussite, les Espagnols contiennent les assauts français pendant une demi-heure. Mais ils vont céder sur une nouvelle tête, cette fois signée Weah qui, sur un corner de la gauche de Valdo, trompe Francisco Buyo (33’, 1-0). Le PSG a fait la moitié du chemin, et continue à pousser, mais le portier madrilène fait bonne garde face aux tentatives de Paul Le Guen, Weah et Ginola.

Mais sur une action collective géniale, encore initiée par Valdo, Buyo ne pourra qu’être le spectateur le mieux placé parmi les 46 000 chanceux qui assistent au chef d’œuvre. Le Brésilien glisse le cuir entre deux joueurs pour Weah. L’attaquant libérien le soulève d’un petit piqué et adresse une passe lobée à Daniel Bravo, qui remet instantanément de la tête à Ginola placé sur la ligne des 16 mètres. "Je suis positionné juste pour réceptionner la balle", décrit celui qui gagnera ce jour-là le surnom d’El Magnifico. "Je ne réfléchis même pas, parce que si je ne tente pas à ce moment-là un geste comme ça, c’est que je ne suis pas un attaquant." Ce geste, c’est une demi-volée sans contrôle qui file à une vitesse supersonique sous la barre de Buyo et qui, à ce moment, offre la qualification au club de la capitale française (81’, 2-0).

L’exploit se dessine et prend une forme quasi définitive trois minutes plus tard quand Ginola termine une contre-attaque en décalant Valdo sur la gauche. L’international auriverde feinte la frappe face à Ricardo Rocha qui se demande encore où est passé le ballon, et glisse le cuir à ras de terre sur la gauche de Buyo (89’, 3-0).

Ceux qui ont déjà quitté le stade pour éviter les embouteillages ont manqué quelque chose. Il ne peut plus rien arriver au PSG et il va écrire la plus belle page de son histoire. C’est sûr… Du moins, c’est ce que croient des tribunes devenues effervescentes, et des Parisiens presque aussi euphoriques. "A 3-0 on s’est vu qualifiés", admet Ginola. "La tension et la concentration retombent. On a peut-être oublié qu’on jouait contre le Real Madrid, une équipe qui pouvait à tout moment revenir et marquer un but."

David Ginola, of Paris Saint-Germain

L'ultime effort

En effet, on ne détient pas le record de victoires dans le championnat d’Espagne et en Coupe d’Europe des Clubs Champions sans être une grande équipe. Alors qu’on la croit hors course, la Casa Blanca reprend des couleurs dans les tout derniers instants. Sur un coup franc côté gauche, Michel envoie le ballon dans la surface parisienne où l’attend Nando Muñoz, qui saute plus haut que Kombouaré pour le remettre dans les pieds de Zamorano. Conclure à bout portant est un jeu d’enfant pour le Chilien, qui pense devenir le héros en envoyant le Real en prolongation (90’+2, 3-1).

"Je me suis fait manger sur le coup, pourtant je pensais être plus fort que lui de la tête. On prend un gros coup sur la tête et on a le sentiment que c’est fini, qu’on a laissé passer notre chance", confesse Kombouaré, alors persuadé que son erreur coûte aux siens leur destin européen. Mais le destin, justement, est par définition persévérant et - surtout - imprévisible. Sur le coup d’envoi, les Parisiens sont dépités, mais Ginola a encore la force de provoquer une faute. Le coupable ? Zamorano…

"C’est l’ultime effort", raconte encore Kombouaré. "Je me sens fautif sur le but qu’on a encaissé et je me dis qu’il faut que j’aille réparer mon erreur, sauver mes copains." A 30 mètres du but madrilène sur la droite, Valdo tire le coup franc, Kombouaré surgit et coupe la trajectoire pour placer une tête décroisée au ras du poteau droit de Buyo et gagner le surnom de Casque d’Or (90’+6, 4-1).

Ultime retournement de situation, le PSG élimine l’ogre madrilène et savoure sa plus belle émotion européenne. Depuis ce 18 mars 1993, les supporters parisiens ont un souvenir en or gravé dans leur mémoire… et ne quittent plus jamais le stade avant le coup de sifflet final.