mardi 25 août 2020, 09:29

Taffarel : "Je voulais que Neymar gagne cette Ligue des champions"

  • Taffarel parle de Diego Maradona, Lionel Messi et Neymar

  • Le Brésilien donne son avis sur les meilleurs gardiens au monde

  • Il admire Gheorghe Hagi et les supporters de Galatasaray

Nous somme le 25 août 2000, le Real Madrid vient d'infliger deux défaites 3-0 à son grand rival Barcelone en Liga et à Valence en finale de la Ligue des champions de l'UEFA. Selon le consultant télé anglais Trevor Brooking, Taffarel va sans doute aller chercher le ballon plusieurs fois dans ses filets vu qu'il est sur le point d'affronter Raul, Luis Figo et leurs amis en Supercoupe de l'UEFA. "Taffarel a été magnifique contre Arsenal, mais pour avoir la moindre chance, il va devoir jouer le match de sa vie". Pourtant, il y a 20 ans jour pour jour, le gardien se montre quasiment infranchissable. Jardel marque par deux fois face à un Iker Casillas de 19 ans et Galatasaray s'offre un doublé européen improbable.

Vainqueur de la Coupe du Monde de la FIFA, États-Unis 1994™, et aujourd'hui entraîneur des gardiens du club turc et du Brésil, Taffarel parle de ses souvenirs du Bosphore, de son passage à Parme, de la finale de la Ligue des champions de l'UEFA 2020 et de Neymar. Il dévoile également le nom de celui qu'il considère être le meilleur gardien au monde en ce moment et du meilleur joueur qu'il a vu jouer.

Claudio, vous jouiez au volleyball à un niveau compétitif quand vous étiez petit. Comment êtes-vous passé au football ?

Le volley était mon premier sport. J'adorais y jouer et j'étais bon. Je jouais pratiquement tous les jours. Le foot, j'y jouais avec mes amis de temps en temps, le week-end si l'occasion se présentait. J'aurais adoré être volleyeur professionnel, mais le foot était une carrière plus plausible. Quand j'y repense, je suis content de ne pas avoir eu l'opportunité de devenir pro au volley parce que je ne serais pas allé très loin du haut de mon mètre 82 (rires). J'ai commencé à joué sérieusement au foot à l'âge de 18 ans. J'ai fait des essais à l'Internacional. C'était déjà âgé pour débuter, j'ai dû apprendre beaucoup de choses très vite, mais j'ai eu la chance d'avoir un excellent entraîneur des gardiens, le Paraguayen Benitez. Il m'a tout appris. Le fait d'avoir joué au volley m'a aidé, pour mes réflexes et mon positionnement, mais je dois ma carrière à Benitez parce qu'il m'a lancé à 18 ans et ce n'était pas gagné d'avance.

Vous êtes le premier gardien étranger à avoir évolué au plus haut niveau en Italie. Comment jugez-vous ce statut ?

J'étais très heureux, très fier. Déjà parce que l'Italie est une terre de gardiens, il y en a tellement. Ensuite parce qu'il ne pouvait y avoir que trois étrangers par équipe donc elles devaient faire un choix sélectif. J'y suis allé avec le Suédois Tomas Brolin et le Belge Georges Grün, deux grands joueurs. Donc c'était satisfaisant pour moi, je réalisais un rêve incroyable. J'ai passé des moments inoubliables à Parme, mais après quelques années, ils ont engagé le Colombien Faustino Asprilla. Il était rapide et talentueux, il marquait des buts. C'était un grand joueur lui aussi, mais il m'a pris ma place parce qu'il ne pouvait y avoir que trois étrangers. C'était une excellente recrue pour Parme, mais pas bonne pour moi personnellement.

Vous avez aussi marqué l'histoire de Galatasaray. Arsenal était le grand favori pour gagner la finale de la Coupe UEFA en 2000, mais vous l'avez emporté aux tirs au but. Quels souvenirs en gardez-vous ?

Je me souviens des moindres détails. Notre équipe était sensationnelle. Tous les joueurs étaient vraiment bons, notre entraîneur était bon. Nos étrangers étaient excellents : Hagi faisait du Hagi, et il y avait aussi Gica Popescu et le Brésilien Capone. Arsenal était un géant européen, mais on était en pleine confiance avant cette finale, on ne craignait personne. Si on était arrivé au match en ayant peur, Bergkamp, Henry, Petit, Vieira, Overmars ou Kanu nous auraient mangés tout cru. Ils nous ont évidemment mis la pression, mais on a très bien défendu, on a eu nos occasions et c'est allé aux tirs au but. Et on a gagné. C'est un triomphe qui restera gravé à jamais dans l'histoire de Galatasaray. On le méritait, en plus. Arsenal n'a pas mal joué, ils ont tout tenté, mais ils n'ont pas réussi à nous battre et nous, on a bien joué. C'est quelque chose dont les joueurs et les supporters de Galatasaray sont très fiers.

Ensuite, vous avez surpris le Real Madrid en le battant 2-1 en Supercoupe de l'UEFA. Quels souvenirs en gardez-vous ?

C'était le Real Madrid, l'un des plus grands clubs au monde, avec toutes ses superstars. Mais nous, on s'est dit : "Donnons le tout pour le tout". On jouait à 11 contre 11, sur terrain neutre à Monaco. Je pense qu'on a été supérieurs au Real Madrid ce jour-là et c'était super de battre une telle équipe de cette manière.

Vous avez parlé d'Hagi. Que pensiez-vous de lui ?

C'est un joueur magnifique. C'est quelqu'un qui mérite de faire partie des plus grands joueurs de l'histoire. Je n'ai jamais vu un joueur avec une telle frappe. La précision, la puissance. Sa lecture du jeu et ses passes, c'était quelque chose aussi. Il a écrit une très belle page de l'histoire de Galatasaray, comme dans d'autres clubs. Les joueurs l'appréciaient énormément, c'est sur lui que reposait notre réussite et les supporters le considèrent comme l'un des meilleurs joueurs à avoir porté la tunique de Galatasaray.

Comment étaient les supporters de Galatasaray ?

Formidables. Absolument formidables. Ils font la différence. Quand l'équipe a besoin d'eux, ils leur donnent la motivation. Lorsqu'on joue à l'extérieur, ils sont toujours présents. Il faut le voir pour le croire : on n'a pas l'impression de jouer à l'extérieur. Je n'oublierai jamais un match sur la pelouse de Dortmund en Coupe UEFA. Tout le monde connaît les supporters de Dortmund et leur passion, mais il y avait plus de supporters de Galatasaray que de Dortmund ! Depuis le terrain, on voyait plus de rouge que de jaune, c'était incroyable ! Ça vous inspire énormément. Et ils sont très bruyants !

Sur le sujet du football européen, qu'avez-vous pensé du match Paris Saint-Germain - Bayern Munich ?

Je pense que les deux meilleures équipes étaient en finale. Paris s'était bien préparé, mais le Bayern avait quelque chose en plus dans son jeu et dans son organisation. J'ai beaucoup soutenu Paris à cause des Brésiliens qui y jouent. Je voulais vraiment que Neymar gagne cette Ligue des champions et ensuite le prix The Best Joueur FIFA. Mais ce n'est pas arrivé. J'espère qu'il pourra gagner ce prix un jour et qu'il sera considéré comme le meilleur joueur au monde. C'était un bon match, bien préparé et bien joué. Ce n'était facile pour personne, mais le Bayern a bien exploité son occasion. Le Bayern mérite d'avoir gagné.

Que pensez-vous de Neymar ?

C'est un grand joueur. C'est beau quand il joue. C'est un dribbleur incroyable, il donne des buts à ses partenaires, il en marque de très jolis. Il est très important pour nous. On espère qu'il sera au meilleur de sa forme pour aider le Brésil à remporter une nouvelle Coupe du Monde. C'est une superstar.

Qui est le meilleur gardien au monde en ce moment ?

C'est Alisson. La FIFA elle-même lui a donné le prix The Best Gardien FIFA. Et c'était amplement mérité. Il a une technique impeccable, il est au top dans les plus grands matches, il joue vraiment bien et il aide son équipe à obtenir de bons résultats. C'est son moment. Derrière Alisson, je pense qu'il y a beaucoup de grands gardiens : Ederson, Marc-André Ter Stegen, Thibaut Courtois que j'apprécie beaucoup, Jan Oblak.

Quel est le meilleur joueur que vous ayez vu jouer ?

Maradona. Je suis un grand admirateur de Maradona. Sa façon de jouer était tellement agréable à regarder. Sa façon de se battre pour son équipe sur le terrain, sa technique incroyable. Ses coéquipiers adoraient évoluer à ses côtés. Je me souviens que Careca n'arrêtait pas de parler de lui.

Pensez-vous qu'il était meilleur que Lionel Messi ?

Celui qui dit quelque chose de mal sur Messi mérite d'être puni. Regardez ce qu'il fait à Barcelone. Ses statistiques sont ahurissantes. C'est un phénomène. Mais je n'aime pas faire de comparaisons. Ils ont joué à des époques différentes. Maradona était le meilleur et aujourd'hui, sans aucun doute, Messi est le meilleur au monde. Messi et Cristiano Ronaldo jouent à des niveaux différents depuis de nombreuses années. Ils ont joué à des époques différentes, le football a changé, mais c'était un plaisir de regarder Maradona jouer.

FIFA.com publiera la deuxième partie de cette interview avec Claudio Taffarel le 1er septembre prochain. Il y évoquera la Seleção, un dîner avec Ayrton Senna peu de temps avant sa mort, Romario, Ronaldo et les Coupes du Monde 1994 et 1998.