jeudi 14 janvier 2016, 17:32

Lira, un but pour changer de vie

Wendell Lira a les mains moites. Normal. Il est nerveux et en plus, il n'a pas l'habitude de soulever des trophées. Le 10 janvier dernier toutefois, à la veille de recevoir le Prix Puskás de la FIFA, c'est une autre récompense à laquelle il n'est pas habitué qui fait naître l'émotion chez le Brésilien : une photo.

"C'est fantastique. Je ne m'attendais pas à ça", affirme à FIFA.com l'attaquant surpris, avant de prendre la pose pour une série de clichés en noir et blanc. S'il s'agit d'une procédure habituelle pour tous les nominés au Gala du FIFA Ballon d'Or 2015, Wendell Lira semble définitivement être, parmi toutes les personnes qui doivent se soumettre à la petite routine, le plus impressionné. "Je crois que les gens ne se rendent pas bien compte ce que cela signifie de venir de la province de Goiás, au fin fond du Brésil, et qu'un but marqué dans le championnat régional devienne un passeport pour un rêve comme celui-ci", poursuit Lira, qui doit sa présence à Zurich à une reprise victorieuse en ciseau retourné, après un pivot à 180 degrés et en pleine course.

Ce jour-là, le 11 mars 2015, sous une pluie battante, 297 spectateurs sont présents au stade Serra Dourada pour assister à ce qui va devenir un événement mondial. Le but incroyable de l'Italien Alessandro Florenzi contre le FC Barcelona en Ligue des champions de l'UEFA a fait le tour du monde. Celui de Lionel Messi face à l'Athletic Bilbao également. Et pourtant, ces deux buts ont reçu moins de suffrages que celui de Lira, visionné 1,4 million de fois sur YouTube. "Vraiment ? Je n'aurais jamais imaginé cela. C'est vraiment sympa car ça a permis de faire connaître Goianésia, qui est une toute petite ville. En dehors de tout ce que ce but m'a apporté personnellement, je suis également heureux pour toute ma province", savoure-t-il.

Quand il a marqué le but qui a changé sa vie, Wendell Lira défendait les couleurs du Goianésia Esporte Clube, équipe d'une ville de 66 000 habitants et située à 170 kilomètres de la capitale de la province, Goiânia. Ce but est l'un des deux inscrits par son équipe lors de la victoire 2:1 sur l'Atlético Goianiense, dans une rencontre comptant pour le Campeonato Goiano, championnat réservé aux clubs de la province. Au niveau national, Goianésia évolue en quatrième division.

Une vie qui change au milieu d'un repas L'histoire retiendra qu'à l'issue du tournoi provincial, l'attaquant de 27 ans ne parvient pas à faire renouveler son contrat. Il reste sans club, jusqu'au 6 novembre précisément. Ce jour-là, Wendell est chez sa mère, où il déguste un excellent arroz com feijão, un plat à base de riz et de haricots qui est aussi l'une des spécialités culinaires de la province. Dans le salon, son téléphone portable n'arrête pas de vibrer. "Je commence à regarder les messages et sur chacun d'eux, je vois le mot 'Puskás'. Je croyais que c'était un canular. J'ai d'abord ignoré tout ça, mais dans les jours qui ont suivi, j'ai dû me rendre à l'évidence. La liste des dix finalistes était sortie et en quelques jours, j'ai reçu plus de 300 appels d'un peu partout", se souvient-il.

L'un de ces coups de fil provient de Vila Nova, club de Goiânia évoluant en deuxième division brésilienne. Lira avait déjà eu des contacts avec lui, mais les choses tardaient à se finaliser. Alors qu'il reçoit des propositions d'autres clubs, il décide de s'engager avec Vila Nova. Mais le meilleur reste à venir. Le conte de fées a commencé, mais on ne connaît toujours pas son dénouement. Celui-ci aura lieu à Zurich, à l'occasion du Gala.

"Avant cela, je n'avais quitté le Brésil qu'une seule fois, pour un tournoi U-20 au Japon. Ma femme, elle, n'était jamais sortie du pays. Par conséquent, pour nous deux, le seul fait de prendre l'avion à destination de la Suisse était déjà une fête", raconte celui que les 20 heures de voyage n'ont visiblement pas fatigué. "Dans l'avion, toutes sortes de choses me passaient par la tête. Je m'imaginais en train de rencontrer Messi, d'être juste à côté de lui. Si on m'avait dit que mon but finirait devant le sien au classement, j'aurais éclaté de rire. Maintenant, je suis bien obligé d'y croire", plaisante-t-il.

Lira regarde une énième fois le trophée qu'il tient dans ses mains, comme s'il ne savait pas quoi en faire. Comme s'il était littéralement tombé du ciel. "C'est lourd. Plus que ce que j'avais imaginé", conclut-il.

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