mardi 18 août 2020, 04:25

Des buts d'Akers et débuts des USA

  • La sélection féminine américaine a disputé son premier match le 18 août 1985

  • Michelle Akers a inscrit le premier but de l'équipe

  • Elle revient sur les modestes débuts des Girls

Synonyme d'excellence, l'équipe féminine des États-Unis est considérée comme la meilleure du monde. Dynamiques et compétitives, ses joueuses sont l'exemple vivant de ce que les femmes sont capables d'accomplir en football.

Il n'en a pas toujours été ainsi. Pays le plus titré en Coupe du Monde Féminine de la FIFA™, les États-Unis ont commencé à collectionner les étoiles dès la première édition de l'épreuve en 1991. On s'imagine souvent à tort que les Stars and Stripes étaient déjà une puissance du football féminin à l'époque, ce qui ne manque pas d'amuser Michelle Akers.

Figure emblématique de l'équipe sacrée en 1991, Akers a fait partie, huit ans plus tard, des légendaires 99ers, la génération qui a conquis le trophée et les cœurs de toute une nation en 1999. La puissante attaquante, qui sera élue joueuse du siècle de la FIFA, était aussi en Italie il y a 35 ans, lorsque les Américaines ont disputé leur match inaugural. Trois jours plus tard, elle a marqué le tout premier but de l'équipe.

En 1985, la sélection féminine des États-Unis n'avait rien de professionnel. La veille de leur départ pour l'historique Mundialito (petite Coupe du Monde) à Jesolo, Akers et ses coéquipières sont restées debout jusqu'à l'aube pour coudre les lettres U-S-A sur leur maillot. Issues de l'équipement de la sélection masculine, leurs tenues mal ajustées ont été obtenues à la dernière minute, donnant le ton d'un tournoi dans lequel les États-Unis ont encaissé un nul et trois défaites.

Ces débuts humbles et peu prometteurs sont à des lieues de l'équipe nationale aujourd'hui auréolée de gloire, choyée par l'encadrement et adorée des fans. Akers évoque l'aventure de 1985 avec une certaine tendresse et quelques rires dans un entretien avec FIFA.com.

La première tournée

Après seulement trois jours d'entraînement, une équipe improvisée et composée essentiellement de joueuses universitaires de moins de 25 ans a rejoint la station balnéaire de Jesolo

"J'étais emballée. Je n'avais jamais quitté les États-Unis, sauf pour aller au Canada, alors j'étais ravie de me rendre en Italie pour jouer au football. C'est gênant de l'avouer aujourd'hui, mais je ne savais pas vraiment ce qu'était une équipe nationale. Je n'ai pas réalisé la chance et l'honneur qui m'était fait de représenter mon pays et d'entrer dans l'histoire. Je crois que c'était le cas de la plupart des joueuses. Mike Ryan, notre entraîneur irlandais, a dû s'en rendre compte, parce qu'un jour, il nous a rassemblées au milieu du terrain et nous a fait chanter l'hymne américain à pleins poumons. C'est là que j'ai compris. En somme, nous avons pris conscience de l'honneur dont nous étions investies grâce à un Irlandais !"

Le premier match

Les États-Unis ont été vaincus 1-0 par l'équipe hôte le 18 août 1985

"Le score aurait pu être plus lourd. Les Italiennes nous ont laminées. Nous étions plus puissantes physiquement, mais elles jouaient bien mieux que nous et en ont fait la démonstration d'entrée. Elles usaient de subtilités tactiques qui nous étaient complètement étrangères. Quand on y réfléchit, cela n'a rien de surprenant. Le football faisait partie intégrante de leur vie et elles voyaient les meilleurs joueurs du monde toutes les semaines à la télé. Ce n'était pas le cas chez nous. Je n'ai pas pris part au match contre l'Italie. Je n'étais pas blessée, contrairement à ce qui a été dit. C'était une décision de Mike. Nous venions tous les deux de Seattle et nous avions des relations difficiles à l'époque. J'ai disputé la deuxième rencontre, qui a aussi été compliquée, mais j'y ai pris beaucoup de plaisir. Les autres équipes étaient beaucoup plus roublardes et futées que nous, mais nous en avons tiré des enseignements précieux."

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Le premier but

Akers est entrée dans l'histoire en égalisant à 2-2 contre le Danemark lors de la deuxième sortie des États-Unis dans le Mundialito

"Il ne m'est pas venu à l'esprit que j'avais fait quelque chose de spécial quand j'ai marqué. Nous voulions prendre notre revanche après notre défaite et montrer que nous n'étions pas là pour faire tapisserie. La fierté de l'équipe était en jeu. Je n'ai pas pensé une seconde à la dimension historique de mon but."

La montée en puissance

Un avenir incertain attendait l'équipe à son retour au pays, après deux autres défaites face à l'Angleterre (1-3) et au Danemark (0-1)

"Là-bas, nous avions l'avantage sur le plan de la puissance et de la forme physiques. Pour tout le reste, les autres équipes avaient des années-lumière d'avance sur nous. Notre obstination et notre détermination nous ont aidées à admettre la supériorité et l'habileté de nos adversaires, et à relever le défi au lieu de baisser les bras. Quand Anson Dorrance a pris la suite de Mike Ryan, il a annoncé d'emblée : "Nous allons être la meilleure équipe du monde". Nous n'avions pas de projet et pas de soutien, rien ne justifiait une telle assurance. Pourtant, nous l'avons cru, et quelques années plus tard, c'est exactement ce que nous sommes devenues : les meilleures.

Si on m'avait dit à Jesolo que nous remporterions la première Coupe du Monde six ans plus tard, ma première réaction aurait été de demander : "C'est quoi, une Coupe du Monde ?". C'était quelque chose d'inimaginable pour nous et pour le football féminin à l'époque. Mais malgré nos piètres performances en Italie, je n'ai pas douté de la capacité des États-Unis à s'imposer sur la scène mondiale. J'ai eu parfois l'impression de pouvoir me projeter dans l'avenir. J'ai encore un article de journal dans lequel je confie vouloir faire une carrière professionnelle, aller aux Jeux Olympiques et devenir l'une des meilleures joueuses du monde. J'avais 13 ou 14 ans. C'était insensé, parce qu'il n'existait pas d'équipe professionnelle de football féminin. Je ne sais pas si cela tient à un grain de folie ou à une vision, mais quoi qu'il soit, c'est ce que j'ai dit."

De la promotion 1985 aux 19ers

Après le triomphe éphémère de 1991 et le tournant historique de 1999, Akers a suivi avec fierté l'ascension de l'équipe nationale

"Après avoir gagné la Coupe du Monde 1991, je m'attendais à ce que notre équipe soit reconnue et célébrée. En fait, nous avons été accueillies par deux personnes à l'aéroport et nous avons réalisé que personne n'était au courant de notre victoire ou ne s'en souciait.

Je ne pensais pas que le chemin serait aussi dur. J'éprouve beaucoup d'admiration et de fierté pour la sélection actuelle. Les joueuses disent souvent avoir été portées par leurs prédécesseures, mais elles ont fait évoluer le jeu et ont su imprimer leur propre style. C'est un bonheur de les regarder jouer.

J'aime retrouver mon état d'esprit dans cette équipe. À mon avis, c'est en cela qu'elle sort du lot. À l'exception des géants comme Pelé et Messi, la plupart des athlètes d'élite sont d'un niveau similaire. J'ai toujours pensé que les vainqueurs se distinguaient par leur mental. Les formations talentueuses ne manquent pas, mais il y a quelque chose de particulier dans la mentalité américaine, notamment au sein de l'équipe nationale, qui nous aide à rester sur le toit du monde."