jeudi 02 avril 2020, 05:32

Koemhong sort de l'orphelinat et entre dans l'histoire

  • Hout Koemhong, 22 ans, est capitaine de l'équipe féminine du Cambodge

  • Avec ses cinq frères et sœurs, elle a grandi dans un orphelinat

  • Koemhong a commencé à jouer en 2008 à la SALT Academy, une ONG parrainée par la FIFA

L'équipe féminine de football de Bryant & Stratton College compte dans ses rangs l'internationale cambodgienne Hout Koemhong qui a déjà vécu une vie trépidante alors qu'elle n'a que 22 ans. La milieu de terrain, capitaine de son équipe nationale, débarque dans l'équipe il y a deux ans. Nouvelle au sein de l'équipe de foot, elle espère aussi décrocher une licence en informatique.

Pourtant, en 2008, ce bel avenir semblait improbable. À l'époque, Hout et ses cinq frères et sœurs vivent dans un orphelinat de Battambang, une ville située à 300 km au nord-ouest de Phnom Penh, la capitale du Cambodge. Sa vie a radicalement chang grâce au football. "Mes parents ont divorcé quand j'avais deux mois et ma mère nous a déposés à l'orphelinat", raconte Koemhong, qui suit des cours en ligne au domicile d'un ami à Marcellus, dans l'état de New York, pendant la crise du Covid-19. "Je ne me souviens pas trop de l'époque où je ne jouais pas au foot."

La SALT Academy, une ONG soutenue par la FIFA, lance alors un projet au Cambodge destiné aux jeunes de la région. L'objectif : améliorer leurs vies grâce au ballon rond. L'orphelinat monte des équipes de filles et de garçons et la petite Koemhong passe toute la journée à les regarder s'entraîner et jouer. Un jour, Sam Schweingruber, entraîneur et PDG de la SALT Academy, lui demande de rejoindre l'équipe féminine. "Quand Sam est venu me voir pour me demander de participer, j'ai refusé", se souvient Koemhong. "J'étais vraiment timide. Mais une fois dans l'équipe, ça m'a tellement plus de courir partout, de courir après le ballon et de le frapper fort."

Sérieuse et compétitirice

Réservée en dehors du terrain, Koemhong se transforme sur le rectangle vert. Elle est sérieuse et compétitrice. Elle découvre alors un bonheur qu'elle n'a jamais ressenti auparavant. Et elle s'amuse. "Bizarrement, la vie est devenue un peu plus difficile une fois que j'ai commencé à jouer au foot", explique-t-elle. "Mes frères et sœurs ne voulaient pas que je joue. J'étais la plus jeune et ils me battaient parce que je jouais au foot. Ils me donnaient plus de tâches ménagères. Ils voulaient que j'arrête de jouer. Mais moi, je ne pouvais pas. Je m'amusais tellement à chaque toucher de balle. Je me suis focalisée sur mon jeu, comme si rien ne pouvait me blesser."

Les progrès réalisés par Koemhong au sein de l'équipe des Mighty Girls de la SALT Academy impressionnent fortement Schweingruber. "Koemhong était la plus jeune de l'équipe, mais elle était époustouflante", raconte-t-il à FIFA.com. "Elle était courageuse et elle arrivait à taper le ballon plus loin que les autres. Quand on a commencé à faire des matches, elle marquait souvent de loin."

La valeur de la vie

Koemhong passe six années avec les Mighty Girls. La SALT Academy s'occupe alors de tout financièrement : logement, frais de scolarité et entraînement. C'est à cette période qu'elle se transforme réellement.

"J'ai grandi avec les Mighty Girls. On travaillait dur, toutes. On allait à l'école ensemble et on s'encourageait à l'entraînement. On était comme une famille", assure-t-elle. "Outre ma progression dans le football, j'ai appris à être une leader, un entraîneur, même une arbitre. On a appris à parler anglais. Le week-end et pendant les vacances, on allait enseigner le foot à des enfants dans des villages. On essayait de transmettre aux filles de là-bas le fait qu'elles avaient le droit de faire ce qu'elles voulaient. À la SALT Academy, j'ai appris la valeur de la vie. J'ai travaillé dur et je suis devenue la personne que je suis aujourd'hui."

En 2017, Koemhong quitte sa ville pour rejoindre la capitale et le Phnompenh Crown SC. Elle évolue dans l'équipe féminine tout en entraînant les U-14 masculins. Lorsque la toute première équipe nationale féminine du Cambodge voit le jour, elle est l'une des premières joueuses à être sélectionnée, et on lui confie le brassard de capitaine.

Lors du premier match international féminin A du pays contre le Timor Oriental le 30 juin 2018, elle inscrit six buts et offre trois passes décisives dans une victoire 12-0. Aujourd'hui cadre de l'équipe nationale, Koemhong est une légende du football féminin cambodgien en plus d'être source d'inspiration pour les jeunes de son pays. "J'ai contourné beaucoup d'obstacles quand j'étais petite, mais j'ai continué à travailler dur et ça va mieux maintenant", conclut-elle. "Je veux donc transmettre ce message aux autres filles : ne lâchez rien !"

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