jeudi 28 juin 2018, 12:56

La déroute allemande en cinq étapes

  • L’Allemagne éliminée pour la première fois à l’issue de la phase de groupes

  • 5 explications à l’échec du tenant du titre

  • Visual Story : L’Allemagne au plus mal

Par Steffen Potter__, Allemagne

L’équipe d’Allemagne a déjà fait ses valises et quitté son camp de base de Vatutinki. Mais son retour au pays s’annonce mouvementé : beaucoup de gens réclament des explications, à commencer par les journalistes.

Dans tous les discours, c’est avant tout la déception qui domine. Personne ne s’attendait à une telle humiliation. Pourtant, certains signes auraient dû inciter à la prudence, mais ni les joueurs, ni les médias n’ont su ou voulu prendre ces avertissements au sérieux. Résultat : pour la troisième fois de suite, le champion du monde en poste a vu la défense de son titre s’interrompre brutalement, dès la fin de la phase de groupes. FIFA.com tente de comprendre les raisons qui se cachent derrière la sortie de route prématurée de la Mannschaft.

1. "Jusque ici, tout va bien" Pendant longtemps, cette phrase a servi de devise au FC Cologne. Aujourd’hui, elle semble être devenue le leitmotiv de l’équipe d’Allemagne dans cette Coupe du Monde. "Jusqu’ici, tout va bien." Après les performances décevantes lors des matches de préparation contre l’Autriche (1:2) et l’Arabie Saoudite (2:1), tout le monde s’attendait à voir l’Allemagne montrer un autre visage, avec le début de la Coupe du Monde de la FIFA™. Comme s’il suffisait d’appuyer sur un bouton...

Mais les problèmes constatés ces dernières semaines n’ont fait que se confirmer lors de la défaite face au Mexique et les prestations livrées contre la Suède et la République de Corée ont révélé l’ampleur du mal. "Après le match contre le Mexique, j’ai eu le sentiment que nous étions un peu trop sûrs de nous", confiait Joachim Löw au moment de quitter la Russie. Malheureusement, le sélectionneur n’a pas trouvé le remède. Petite précision : le FC Cologne a été relégué en deuxième division la saison dernière.

  • En tout et pour tout, l’Allemagne a mené au score pendant... une minute sur l’ensemble de cette Coupe du Monde.

2. Des cadres en difficulté Si l’on se penche sur les performances en club des internationaux allemands, la Mannschaft devait logiquement faire partie des candidats au titre. Malheureusement, les cadres qui étaient attendus en Russie n’ont que rarement évolué à leur meilleur niveau. Avant le début du tournoi, beaucoup se demandaient si Manuel Neuer parviendrait à retrouver son niveau après une longue blessure. Au final, ces interrogations se sont révélées infondées. En revanche, Mesut Özil, Julian Draxler et Thomas Müller ont confirmé leur méforme actuelle. Jérôme Boateng n’a pas réussi à faire oublier sa blessure, Toni Kroos est resté très discret et Sami Khedira n’a pas réussi à apporter au jeu allemand la stabilité dont il avait besoin.

  • L’Allemagne n’a inscrit que deux buts dans cette Coupe du Monde, soit le plus faible bilan de son histoire. Seul le Panama a fait encore moins bien (1 but).

3. Des champions sur le déclin Plusieurs anciens champions du monde n’ont pas été à la hauteur de leur réputation en Russie. Cette cause est sans doute la plus compréhensible : un entraîneur qui a connu ses plus belles réussites avec certains joueurs préfère naturellement s’appuyer sur eux pour construire l’avenir. Qui plus est, certains champions du monde 2014 ont encore de belles années devant eux. Néanmoins, compte tenu de l’état de forme pour le moins inquiétant de quelques cadres, il aurait sans doute été judicieux d’accorder un peu plus de temps de jeu à des jeunes prometteurs, comme Julian Brandt.

  • L’Allemagne a passé 43 pour cent de son temps de jeu dans les 30 mètres adverses. Aucune équipe n’a fait mieux en Russie. L’Espagne arrive deuxième (36%) et l’Argentine troisième (32%).

4. Une équipe trop prévisible Après le premier match, de nombreux journalistes ont demandé aux Allemands s’ils avaient été tactiquement surpris par les Mexicains. Une chose est sûre : la réciproque n’était pas vraie. Les trois adversaires de la Mannschaft savaient parfaitement à quoi s’attendre et ils ont pu se préparer en conséquence. Même les permutations sur les côtés ont été anticipées et habilement neutralisés par les Sud-Coréens lors du dernier match. L’Allemagne n’a jamais varié : elle a continué à jouer haut, à se concentrer sur la possession dans les 30 mètres adverses, sans jamais se montrer tranchante ou surprenante. Un joueur comme Leroy Sané a cruellement fait défaut. Mais à la surprise générale, le meilleur jeune joueur de la Premier League 2017/18 est resté à la maison. Les coups de pied arrêtés avaient été l’une des forces allemandes en 2014. Cette fois, ils n’ont pas apporté grand-chose.

  • L’Allemagne a exploité environ quatre pour cent de ses occasions. C’est le plus mauvais total de toutes les équipes engagées en Russie. La deuxième sélection la moins réaliste pointe à sept pour cent d’occasions converties. À l’autre bout du classement, la Russie affiche 38 pour cent.

5) Un manque de réalisme On ne peut pas dire que l’Allemagne ne s’est pas procuré d’opportunités, même si les occasions franches ont été plutôt rares. Contre la Suède, les Allemands auraient pu faire la différence à plusieurs reprises. Le même scénario s’est répété face à la République de Corée : à 0:0, la Mannschaft n’a jamais pu marquer. Il a manqué un vrai buteur aux champions du monde en titre, contrairement à la plupart des autres équipes. Thomas Müller n’a pas réussi à s’imposer dans ce rôle, pas plus que Timo Werner ou Mario Gomez.

  • L’Allemagne a tiré 72 fois au but dans cette Coupe du Monde, bien plus que le Brésil (57) et l’Espagne (49).

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Et maintenant ? Les conséquences de cet échec dureront sans doute bien plus longtemps que l’aventure russe. En arrivant à Francfort jeudi, le président de la DFB Reinhard Grindel a fait savoir que "la direction sportive [s’était] engagée à fournir une première analyse technique à la direction de la DFB dans le courant de la semaine". "Dans la foulée, je m’attends à ce que le sélectionneur évoque son avenir", a-t-il ajouté. Selon lui, le temps est venu "de lancer les profondes réformes dont nous avons besoin à présent". Quant à savoir de quoi il s’agit, il faudra attendre les prochaines semaines et les prochains mois pour le découvrir.