mardi 07 juillet 2020, 07:43

Gerd Müller : "Quand vous gagnez la Coupe du Monde, vous êtes le meilleur"

À l'occasion de l'anniversaire de Gerd Müller le 3 octobre, retrouvez l'interview que le légendaire attaquant de l'Allemagne avait accordée à FIFA.com il a quelques années pour évoquer ses souvenirs de Coupe du Monde.

  • Müller évoque le manque d'harmonie de la Mannschaft en 1974

  • Il revient sur sa nuit blanche avant la victoire en finale

  • L'ancien attaquant pense que les Pays-Bas les ont pris à la légère​

Gerd Müller a inscrit dix buts à Mexico 1970, insuffisant pour décrocher plus que le bronze. Quatre ans plus tard, il remportait avec l'Allemagne de l'Ouest la Coupe du Monde à domicile face aux Pays-Bas.

Le légende s'est confié au micro de FIFA.com sur le manque d'harmonie surprenant dans l'équipe de Helmut Schön en 1974, sur ses plus grands souvenirs mondialistes et sa conviction que la Mannschaft était plus forte en 1970 que lors de son sacre lors de l'édition suivante.

Vous avez participé à deux Coupes du Monde la FIFA, en 1970 et en 1974. Quel souvenir gardez-vous de ces deux éditions ?

J'ai toujours dit que je m'étais beaucoup plus amusé lors de Mexique 1970 qu'en 1974. Tous les matches du Mexique sont entrés dans les annales et l'équipe était beaucoup plus soudée. Il n'y a presque eu aucun différend entre les joueurs. Je ne peux malheureusement pas en dire autant de 1974.

Les matches étaient-ils de meilleure facture ou l'équipe était-elle simplement plus en harmonie?

En 1970, nous avions la meilleure équipe. Les gens ont beau dire que l'Allemagne était plus forte en 72 et en 74, je persiste à penser que l'équipe de 1970 est la meilleure que nous ayons eue.

Qui a été votre adversaire le plus coriace ?

Rosato ! L'Italien Roberto Rosato. C'était un véritable spécialiste du marquage à la culotte, mais un gentleman, même s'il s'était accroché à moi et m'avait griffé. Puis, en deuxième mi-temps, il a soudain disparu. Nous attaquions et je ne l'ai plus vu. "Mais où est donc Rosato ?", me suis-je dit. Je me suis retourné et il n'était plus là. Il avait déjà quitté le terrain. Il s'était blessé au genou et avait cédé sa place à Burgnich. Ce dernier était un milieu, pas un défenseur. Il ne jouait pas sur l'homme, mais restait deux, trois mètres en retrait. Cela m'a permis de toucher l'un ou l'autre ballon, ce que Rosato ne m'avait pas laissé faire. Si tu ne te précipitais pas vers le ballon, tu n'avais aucune chance de t'en emparer parce que Rosato était déjà là. Cela dit, je dois dire qu'il n'était pas vicieux.

Y a-t-il un but qui mérite une mention spéciale ? Un but dont vous diriez qu'il est votre plus beau ou votre plus important ?

Oui. Mon but en finale est sans aucun doute le plus important. Mais le plus beau, c'est contre l'Angleterre que je l'ai marqué. Grabowski centre, Hannes Löhr remise de la tête devant le but et je marque, la jambe levée très haut. J'ignore encore comment j'ai réussi à mettre le pied si haut et à toucher la balle. Mais c'était but !

Pouvez-vous comparer cela avec la victoire en Coupe du Monde ? Un résultat personnel d'un côté et un succès collectif de l'autre ?

Je dois dire que les équipes étaient beaucoup plus fortes en 1970. Le Maroc était peut-être notre adversaire le plus faible, mais pour le reste, toutes les équipes comptaient en leurs rangs des joueurs de calibre mondial. Nous n'avons entamé aucun match en nous disant que ce serait facile. Il a fallu se battre à chaque fois.

Et vos dix buts en 1970...?

Jairzinho en avait marqué sept. Je me souviens que nous avons regardé la finale en espérant qu'il n'en marquerait pas trois de plus...

Revenons à 1974, à votre victoire, mais aussi à la défaite contre l'ex-RDA. Cela avait été une humiliation à l'époque ?

Oui, mais nous n'avons pas bien joué en 1974. Les trois premiers matches ont même été catastrophiques. L'équipe ne tournait pas rond. Rétrospectivement cependant, cette défaite a plutôt fait nos affaires. En gagnant, nous nous serions retrouvés dans l'autre groupe, avec les Pays-Bas et le Brésil...

Vous n'avez pas été épargnés par la critique après cette défaite.

Evidemment. Un vent de panique soufflait sur le camp d'entraînement après cette défaite. Schön était furieux et nous avons discuté jusqu'au petit matin. Dans des conditions normales, cela n'aurait jamais dû se produire. Nous aurions dû gagner. Nous nous demandions également qui d'Overath ou de Netzer était le meilleur milieu de terrain. Les joueurs s'étaient trompés à ce propos, parce qu'Overath était en fait le meilleur. C'était un meilleur compétiteur que Günther Netzer.

On raconte que Günther Netzer a dit "Overath est né pour l'équipe nationale"...

Oui, Overath ne baissait jamais les bras. Il se démenait sans compter pendant 90 minutes. Mais nous avions très bien joué avec Netzer lors de l'Euro 1972. Cela nous avait un peu aveuglés et nous pensions qu'il était indispensable à l'équipe. C'était une erreur, car c'est Overath qui aurait dû jouer : il était en effet un meilleur compétiteur. Overath n'avait disputé que la seconde mi-temps. Alors nous avons dit à Schön que des changements s'imposaient. Et il a aligné cinq nouveaux joueurs contre la Yougoslavie. L'équipe a commencé à tourner et nous avons mieux joué.

Voulez-vous dire que ce sont les joueurs qui ont fait l'équipe ?

Nous avons dit à Schön qu'il devait faire quelque chose pour éviter de se faire sortir.

Y avait-il plus de pression sur vos épaules parce que vous jouiez en Allemagne ?

De la pression, il y en avait. Nous étions nerveux avant le premier match. Nous avons battu le Chili sur le plus petit score grâce à un coup de patte de Paul Breitner. Un but splendide d'ailleurs. Ensuite, nous avons dominé les Australiens sur le score de 3-0. En jouant mal ! Puis il y a eu le fameux match contre la RDA. Le réveil a été brutal ! Là, nous avons vraiment commencé à devenir nerveux.

En finale, les Pays-Bas ont ouvert le score très tôt. Avez-vous accusé le coup sur ce premier but ?

Oui, même si au décompte final, c'est une bonne chose que les Néerlandais aient marqué d'entrée de jeu. Par la suite, ils nous ont sous-estimés. Ils se sont déconcentrés jusqu'à ce qu'ils s'aperçoivent que les Allemands n'étaient pas morts. Alors ils ont de nouveau accéléré.

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A quoi avez vous pensé une fois dans les tribunes et lorsque vous avez brandi la Coupe ?**

C'était une sensation inoubliable. C'est vraiment extraordinaire d'être champion du monde et de tenir la Coupe du Monde en mains. Quand vous gagnez la Coupe du Monde, c'est que vous êtes le meilleur.