jeudi 18 février 2016, 14:18

Les îles Salomon veulent rêver tout haut

Quand on pense "passion pour le foot", les images envoient souvent en Amérique du Sud, dans les pays européens historiques ou encore en Afrique. Pourtant, rares sont les nations capables de se mesurer aux îles Salomon en termes d’engouement, au moins si l’on tient compte des proportions. Il n’est pas rare que le Lawson Tama Stadium de Honiara, un stade situé au pied d’une colline, accueille des affluences à cinq chiffres. Cela n’a rien d’anodin quand on sait que Guadalcanal, la capitale, compte à peine 100 000 habitants, pour un total de 500 000 à l’échelle nationale.

Toutefois, les matches importants ne sont pas légion aux îles Salomon. Mais cela n’empêche pas (à moins que cela ne l’encourage !) le football de faire partie des principaux points de convergence des habitants. Il y a 12 ans, tout le pays s’est massé autour des postes de radio jusque tard dans la nuit pour suivre le plus grand exploit dans l’histoire du pays. Il n’y avait ni couverture télévisée, ni Internet, juste les commentaires sobres de la grande figure de la radio locale, récemment partie à la retraite, Bart Basia.

Ce soir-là, un match nul 2:2 contre l’Australie à Adelaïde offrait une place en finale des éliminatoires de la confédération océanienne. Les îles Salomon se retrouvaient donc à un match d’une qualification pour la Coupe des Confédérations de la FIFA et d’un barrage pour la Coupe du Monde de la FIFA contre l’Uruguay. Malheureusement, il n’allait pas y avoir de choc avec la bande de Diego Forlan et autres Alvaro Recoba. L’Australie allait prendre sa revanche au match retour. Mais cette performance intervenue juste avant Allemagne 2006 est restée gravée dans la mémoire collective.

Repartir au combat Les dernières campagnes ont permis de constater la compétitivité des îles Salomon, mais les espoirs nés il y a une dizaine d’années se sont progressivement évanouis, la faute à la hausse du niveau moyen des sélections océaniennes. Cette année, les Bonitos auront une nouvelle occasion d’écrire leur histoire en traversant la mer qui les sépare de la Papouasie-Nouvelle-Guinée pour disputer la phase 2 de la compétition préliminaire pour Russie 2018.

"Jouer en Papouasie, c’est bon pour nous" a souligné Fa’Arodo à FIFA.com lors d’un récent passage en Australie, où les îles Salomon se sont préparées en vue des matches de mai-juin. "L’environnement nous convient, surtout par rapport aux épreuves jouées en Nouvelle-Zélande, où on a beaucoup de mal à s’adapter au contexte."

Si les conditions plaisent donc aux îles Salomon, la chaleur et l’humidité de Port Moresby risquent de compliquer la tâche d’autres visiteurs, notamment les favoris néo-zélandais. Les All Whites semblent les mieux placés pour l’emporter, juste devant les Samoa, mais il est difficile d’établir une hiérarchie pour les six autres équipes dans une compétition où seule la moitié du plateau passera à la phase suivante.

Dire que Fa’Arodo connaît bien le football océanien revient à sous-estimer son vécu. Il a évolué dans trois nations du continent (la Nouvelle-Zélande, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et les îles Salomon), ainsi qu’en Australie, qui faisait autrefois partie de l’OFC. Il est également le seul joueur natif des îles Salomon à disputer le championnat professionnel australien, l’A-League, et il entame sa quinzième saison sur la scène internationale.

Exubérance et finesse Réputées pour leur flair et leur inventivité, les îles Salomon ont logiquement trouvé un terrain d’expression dans le futsal et le beach soccer.  "Techniquement, on a bien progressé au cours des dix dernières années, considère Fa'Arodo."C’est un gros plus par rapport à avant. La plupart des garçons ont un vrai talent naturel. On sent que nos résultats ne sont pas à la hauteur de notre potentiel. Le niveau est de plus en plus élevé en Océanie, donc on va devoir se battre pour rejouer les premiers rôles."

Reste encore à voir si les îles Salomon seront capables de rééditer l’exploit réalisé il y a plus de dix ans. En tout cas, un éventuel succès sur la scène mondiale serait de nature à réunir un pays divisé par sa géographie. "Dans les villages, les gens seront accrochés à la radio et, dans les villes, ils vont regarder la télé, explique Fa’Arodo, non sans une certaine excitation. "L’engouement est énorme. Toute la nation se rassemble et devient folle à cause du football. Si on décroche un bon résultat, ça ferait un bien fou au football dans les îles Salomon, conclut-t-il avec l'envie de pouvoir à nouveau passer du rêve à la réalité.